Près de quarante ans que ça dure : Wire suit sa trajectoire, intègre et rigoriste, mais pas rigide. A l'heure où The Pop Group resurgit avec un album dynamique (Citizen Zombie), mais au punk-funk daté, et que le Gang of Four, sur What happens next, n'est plus que le puissant mais clinquant véhicule sans direction du désormais seul Andy Gill, Wire demeure d'une rassurante constance. Rassurante ? Le terme peut paraître incongru à propos du groupe délibérément dérangeant de Colin Newman. Pourtant, l'instinct pop de Wire (Dot Dash, Outdoor Miner...) a toujours été l'épine dorsale du quartet. Son dernier album, Change becomes us, reprenait des titres abrupts et inaboutis du passé pour en faire des merveilles, entre menace instrumentale et troublante placidité du chant. Le nouveau, sans titre (comme un nouveau départ ?), enfonce le clou. Point de production high-tech ici pour faire moderne. Le son, Wire l'a eu dès l'origine. Le ton aussi, avec ce chant captivant de Colin Newman, le plus présent des chanteurs volontairement distants. Ici, Wire, en mode spontané, paraît presque en roue libre, avec des titres fluides joués quasiment live en studio, sans préméditation. Rythmique métronomique sans être assommante, guitares qui moulinent avec élégance et mélodies presque douces et entêtantes. Sur la fin, le climat s'alourdit, la tension monte. Manière de dire que si Wire est aujourd'hui apaisé, sur le fond il n'a pas changé.
